Georges Lebouc est philologue. Il est l’auteur d’un Dictionnaire du bruxellois. Il nous éclaire sur les subtilités de cette langue.
Parlez-nous du bruxellois ?
D’abord, il n’y a pas un bruxellois. La plupart du temps, les bruxellois autochtones vont vous dire LE bruxellois. Ce n’est pas vrai. Il y en a deux. Pour la simple raison que le dialecte parlé à Bruxelles est en réalité du brabançon. Cette langue est très proche du flamand. Par contre, il existe à côté un bruxellois francophone qui est né avec une quasi précision en 1910.
D’où sort-il ?
Il sort d’une pièce de théâtre : Le Mariage de Mademoiselle Beulemans. C’est une pièce remarquable encore jouée aujourd’hui, où l’on trouve dans des phrases francophones des mots issus du bruxellois flamand. Un mix de français avec des mots d’origine flamande, en somme.
Pourquoi ces deux langues existent-elles concurremment ?
Au début du XXe siècle, le fond autochtone a commencé à s’enrichir. La Belgique était alors une puissance coloniale avec la possession du Congo. Elle était aussi la deuxième puissance industrielle mondiale, derrière l’Angleterre. Les gens se sont enrichis. Or s’enrichir, ça signifie singer les français. Car le belge a toujours eu un complexe d’infériorité vis-à-vis de la France. Ce fond flamand est resté, mais ils l’ont mis dans des phrases où ils essayaient de parler français. Alors de temps en temps, ils employaient des mots d’origine flamande. Soit parce que le mot français ne leur venait pas, soit parce que c’est beaucoup plus savoureux d’engueuler l’autre en flamand. C’est plus sonore. C’est plus percutant. Dès que deux bruxellois s’engueulent, ça va fuser en insultes d’origine flamandes. Ils ne vont pas se dire SALAUD, mais SMERLAP ! Parce que ça fait mieux. Comme les français emploient l’argot.
Les bruxellois sont-ils encore parlés aujourd’hui ?
Le bruxellois francophone, oui. Le bruxellois purement flamand n’est plus parlé que dans le nord de Bruxelles et dans des communes qui jouxtent la province d’Anvers.
Quelles sont les caractéristiques du bruxellois francophone ?
Sa faculté de créer des expressions à l’infini. C’est aussi une langue extraordinairement imagée. C’est une langue qui pense en images.
Précision : il existe des querelles linguistiques sur les origines du bruxellois. Il s’agit ici uniquement de la version de Georges Lebouc.
Quelques unes des insultes et expressions les plus savoureuses…
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Les fruits et légumes moches savent aussi séduire
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