Certains ont connu la guerre et ont fui devant la violence nazie, d’autres n’ont même pas l’âge de savoir lire. Certains ont été élevés à Bruxelles, d’autres ne sont là que depuis quelques mois. Certains croient en leur avenir, d’autres auraient préféré vivre il y a cent ans.
Une expérience les rassemble : le spectacle 100 % Bruxelles, véritable sondage vivant, mis en scène par Rimini Protokoll dans le cadre du Kunstenfestivaldesarts. Le collectif allemand n’en est pas à son coup d’essai. 100 % Berlin est né en février 2008, puis Vienne, Athènes, Melbourne et même Tokyo en novembre dernier.
Le concept est simple : 100 Bruxellois ont été sélectionnés pour former un échantillon le plus représentatif possible de la ville. Ils défilent un à un sur un large cercle vert qui illumine le centre de la scène et se présentent face aux spectateurs. Ils saisissent le micro et parlent d’eux, de leurs passions, de leurs joies, de ce qui les rend fiers. Aucun doute, ce ne sont pas des comédiens, certains ont la voix qui tremble, pour d’autres, c’est la gestuelle qui trahit leur anxiété.
Chaque 1% présente ensuite le suivant, qu’il a lui-même proposé aux metteurs en scène. Un lien presque visible se crée entre les participants. Bruxelles prend forme sous nos yeux. Elle est de toutes les couleurs et de toutes les langues.
Chaque participant répond ensuite à une série de questions en se plaçant d’un côté ou l’autre de la scène. On parle de Dieu, de politique ou de la peine de mort. Puis des thèmes plus personnels sont abordés. Avez-vous déjà avorté ? Avez-vous déjà trompé votre conjoint ? Êtes-vous amoureux d’un des autres participants ? La salle est alors plongée dans le noir et chacun répond anonymement à l’aide d’une lampe torche.
Une caméra est placée au-dessus de la scène pour permettre au spectateur d’avoir un aperçu global de ce sondage à taille humaine. A Bruxelles, le spectacle prend tout son sens : 181 nationalités différentes se côtoient dans 19 communes et un tiers de la population y est étrangère.
Le message est clair et certains trouveront peut-être la méthode un peu grossière : l’objectif est de mettre un visage sur des statistiques. Difficile pourtant d’en faire un spectacle militant. Car l’essentiel est ailleurs. Les participants jettent leur authenticité et leur unicité à la tête du spectateur. 100 % Bruxelles est un cri d’humanité.
(photos Vaihere Tauotaha)