On croira que les aventures avec l’inacceptation d’autrui remontent à cette époque où les premiers Hommes contemplèrent leurs reflets dans l’eau. Ce choc narcissique mettra en concurrence ces Hommes qui seront continuellement obsédés par le soi.
Ces personnages ne cesseront d’haïr que quand tous les Hommes de la terre s’aligneront aux mêmes standards (phallocratie, théocratie, totalitarisme, racisme…). L’idéal pour ces bien-penseurs serait de former des couples assez plaisamment assortis, sans dégât de couleurs et sans anarchie mystico-spirituelle, une consanguinité acceptable. Peut-t-on prendre les Hommes tels qu’ils sont et accepter de subir leur morale longtemps prescrite par une éthique et des concepts « révolus » ? Des conventions humaines obéissant non pas à la diversité naturelle, mais à un ordre théologique et au paganisme des sophistes qui limitent toute liberté individuelle ? Ces théories ne découlent-elles pas de certains raccourcis intellectuels et conceptuels et de quelques codex moyenâgeux qui légifèrent en place de raison ? N’oublions pas non plus les chefs spirituels (qui pullulent au Maroc comme dans presque tous les pays arabes), et la majorité ne demande qu’à être asservie, un peu comme les moutons de panurge qui suivent sans se poser de questions. C’est parce qu’il y a des oreilles qui prêtent à entendre, des esprits grégaires, qu’ils continuent de perpétuer leurs abominations philosophiques.
Entendons-nous bien, nous n’avons rien contre la pensée unique, aussi médiocre soit-elle. Sauf qu’elle doit découler d’un processus philosophique. La philosophie grecque se divisait en trois sciences : la physique, l’éthique et la logique. Une division conforme à la nature des choses, à la compréhension de l’environnement et des phénomènes. Si l’on travaille sur la projection du racisme dans l’inconscient collectif marocain, cette connaissance des choses ne considère que la forme et ne s’occupe guerre de l’entendement et de la raison. Nous sommes sur une dynamique philosophique totalement erronée, car l’on applique la philosophie matérielle – qui s’occupe des objets – à la logique, à l’éthique et à la morale. Et les canons qui en découlent ne se basent aucunement sur la démonstration mais davantage sur une lecture phénoménale et limitative des cas. La démonstration, si elle existe dans leurs rhétoriques, découle foncièrement de la concordance des textes religieux avec la science et des parallélismes sophistes.
La philosophie morale contemporaine prend en considération la temporalité. Ce qui veut dire que les lois qui affectent l’Homme sont liées à un environnement défini. Pour chaque problème, on essaiera d’apporter une solution réaliste qui s’appuie sur une analyse sociologique et une rigueur scientifique. Actuellement, dans notre société , la morale et l’éthique proviennent de lois et canons moyenâgeux, donc d’analyses révolues. Même certains écrivains et sociologues se rangent du côté de ces idéologies. Ils omettent l’idée que ce même public soit déjà lobotomisé par des siècles de supercheries dont il conviendra des combats particuliers. Des combats non idéologiques mais fortement philosophiques et scientifiques. Ce n’est pas la guerre de la laïcité, de l’athéisme ou encore de la science contre la sainte doctrine religieuse, mais c’est bien la guerre de la raison contre le sophisme, la sottise, la bêtise humaine. Ces paladins, porteurs du pouvoir sacré de la foi, n’hésitent plus à fustiger les communautés, les ethnies et ont fait de la misogynie et de l’antisémitisme leur cheval de bataille.
L’univers créé en sept jours ? soit. Mais nous attendons toujours de vous voir défendre cette idée devant un comité de physiciens et de scientifiques. Quant aux femmes et ethnies, quelle mine ferez vous devant un comité d’historiens, de philologues et de sociologues défenseurs d’une cause libérale ? Concevez que l’humanité, la science, les arts, la philosophie et le savoir existent bien avant le septième siècle et qu’il faut cesser de porter un jugement sélectif sur l’histoire des humanités et de la science. La force des propos racistes et misogynes deviendront droit s’il n y a pas de contrôle et de régulation. Nous ne sommes pas dans la censure mais dans l’équité de la parole. Comment pouvons-nous tolérer des fatwas morbides et fustiger effroyablement les libres penseurs ?
Ce n’est pas qu’une question d’éducation mais davantage d’impunité. Les raisons ne manquent guère pour décrire les malaises sociaux et éthiques. La société actuelle se résume à la loi du plus fort, comme le marquait Rousseau dans son Pacte social : “S’il faut obéir par force, on n’a pas besoin d’obéir par devoir”. Et les individus ne doivent plus craindre de désobéir aux préceptes superflus, c’est même un devoir humain plus que national de défendre les libertés et les équités. Aucun homme n’a d’autorité biologique sur son semblable et de même, aucun livre, aussi sérieux et aussi sacré qu’il soit, ne doit écarter les fondements même de l’humanisme et de la tolérance : l’équité femme/homme, non négociable et non sélective, et la tolérance sans regard sur l’ethnie ou la religion.
Ces hommes despotes et avides de réflexions se vexent à la moindre idée qui ne concorde point avec une doctrine qui arrange leurs misères intellectuelles. Ce cartel est appelé “oulémas ou scientifiques”, un terme qui, longtemps, avait quelque peu de sens mais aujourd’hui, est donné gracieusement pour légitimer une érudition surréaliste. Dire la même chose de tout le monde, c’est supposer que ces biens-penseurs soient tous aliénés. C’est également sous-estimer une réflexion philosophique qui ne se limite jamais à une pensée unique et partiale.
Mais l’on considère aliéné toute personne qui s’oppose à la liberté de penser et qui prêche les doctrines sans en considérer les conséquences à long terme car “renoncer à sa liberté, c’est renoncer à sa qualité d’homme, aux droits de l’humanité, même à ses devoirs”. L’on arrivera donc au bout du machisme et du racisme que si toute la société établisse les fondements d’une nouvelle morale et du principe suprême de l’égalité. Non pas une égalité partielle telle que nous la vivons, mais une équité qui découlera de l’instauration d’une pensée libre non censurée et non muselée. C’est élémentaire, même un enfant en comprendra l’enjeu : l’émancipation de la femme et l’acceptation d’autrui mèneront automatiquement, effectivement et de façon systémique au bon vivre et à l’évolution de l’inconscient collectif.
Dans son livre, La divine essence même est l’amour et la sagesse, Emmanuel Swedenborg ne cesse de prêcher la sagesse et la bonne conduite humble : “Si tu rassembles toutes les choses que tu connais, et que tu les places sous l’intuition de ton mental, et que dans une certaine élévation de l’esprit tu recherches ce que c’est que l’universel de toutes choses, tu ne pourras faire autrement que de conclure que c’est l’amour et la sagesse, car ce sont là les deux essentiels de toutes les choses de la vie de l’homme ; tout son civil, tout son moral et tout son Sspirituel dépendent de ces deux, et sans ces deux ils ne sont rien…”. L’on ne veut plus méditer sur les affirmations des réactionnaires et des orthodoxes, nous avons envie d’écrire sur les choses de la vie, sur les arts et les humanités. Mais l’on ne peut aspirer à ce niveau de productions que si ces hommes consentent à ne plus moraliser ou à se taire à jamais, faisant place à un champs culturel propice. Ce sont les mêmes hommes qui ont fustigé Galilée… Vivre et laisser vivre, est-ce trop demandé ?