Philosophiæ Principia

June 29th, 2014, 9pm

Il y a bien des fois où il faut dire le bien et le mal avec la même franchise. Des fois où l’on devient méprisable envers ceux qu’on aime car nous touchons à leur sacrosaint : la bien-pensance. L’habitude de ne plus penser consume ainsi toute liberté et attire les hommages de la cruauté.

Les diplômes ont remplacé l’intelligence et la réflexion, des esprits non-libres car impatients de dégainer le verbe bien-penseur à un public déjà affamé.

Il n y a pas plus ignorant, plus négligeant et plus obstiné qu’un étudiant fraîchement diplômé pensant avoir tous les acquis pour changer son environnement.

Pourquoi oublier le plaisir d’apprendre, ces premières affections tendres de goûter à la liberté de la contradiction et à la jouissance de la sagesse libre. Un train d’éducation tout à fait atypique, car l’éducation commence après l’école.

On ne se lassera point de jouir au plaisir de dire : « je ne sais pas ». Cette phrase qui constitue le fondement même du savoir et de la sagesse. On ne se souviendra certainement pas de nos heures d’étude, sans doute fort intéressant, mais parfois sans valeur morale et intellectuelle.

La construction de l’esprit sain démarre par l’anéantissement et la déconstruction de l’acquis. Nous avons tous cédé, un certain moment de notre vie, à la complaisance de la pensée mâchée, prête à être consommée et digérée, faisant un alors avec notre conscience et connaissance du monde.

Nous avons là une chance unique pour fixer notre caractère. La chance d’être un nouveau-né avec un cerveau formé. Videz votre esprit de toute croyance, de tout isme, donc de tout concept pour regarder véritablement ce monde.

Atteindre la sûreté de conscience n’est pas un but en soi, et même n’ayons plus peur de déplaire. On a décidé à notre place de nos goûts, de nos pulsions, de nos désires, donc de tout ce qui nous constitue. Un réceptacle qu’on s’avisait bien de remplir avec toutes les « bonnes » choses du monde : dualisme, manichéisme et rapports de force. D’ailleurs, Rousseau écrivait que : « le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir. De là le droit du plus fort. ».

L’âge nubile de certains ne les empêche guerre de consentir au machisme, à la misogynie et à la vieille mode. On fait comme les ancêtres, comme les aïeules, comme les parents, comme les patriarches, comme les modèles. Des personnages exemplaires, prophètes de l’éducation qui empruntaient l’usage et la bonne conduite d’une métaphysique révolue.

L’âge de raison, c’est l’âge de penser par soi-même. Tâchez donc de bien vider votre bibliothèque mentale et concevez de nouvelles approches. Cette anarchie intellectuelle ne prendra forme qu’avec l’écartement des fondamentaux sans le concours et sans l’intervention de quiconque.

La découverte nouvelle se matérialise en suivant toutes les traces. Construisons les fondements de ce qui va être notre « palais mental », ne vous empressez pas de vouloir construire un foyer, une bâtisse, une « villa » pour ce corps alors que l’esprit, lui, est à l’air libre. Il n y a pas de livre de bonnes conduites et ce n’est pas ici que nous traiterions de ce qu’un individu doit accomplir. Certainement car la notion d’accomplir est un concept limité dans le temps alors que le savoir ne saurait commencer, ni finir.

Si le temps manque, pour quelconque raison, d’entreprendre ce dessein, faites juste un geste pour la société en évitant les réflexions piétistes, le machisme et la oisiveté des commentaires. Si vous avez un goût de préférence pour le moyen-âge, ne soyez pas tenté d’en abuser car certaines oreilles fragilisées par l’absurdité s’en sentiraient souillées.

Personne ne se doit être redresseur des torts, porte-parole de la bienséance ; toute disconvenance est de mise pour permettre une évolution mentale ascendante. Ce n’est pas dans les livres, seulement, que nous vaincrons la tyrannie de la pensée unique, peut-être dans l’acceptation de la différence et dans le nihilisme une position de front contre l’intelligentsia sophiste et les théocrates.


Sanna and Anne Marie said thanks.

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Samir Taouaou

Writer, traveler, photographer

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