Miguel Àngel Martinez, vice président du Parlement Européen

May 7th, 2014, 12pm

Miguel Angel Martinez est un des 14 vice-présidents du Parlement Européen. Député Espagnol de 1977 à 1999, il a activement milité pour l’entrée de l’Espagne dans l’Union. Il se fait élire au Parlement Européen en 1999. Il nous parle de son travail et de sa vision du quartier européen.

Crédits Photo: Friends of Europe (Flickr)

Qu’est ce qui vous a amené à la politique européenne à Bruxelles?

J’ai toujours été l’une des personnes qui a négocié pendant des années l’entrée de l’Espagne dans l’UE. J’ai été de ceux qui ont beaucoup cru à l’Europe. L’Espagne avait besoin de stabilité, de fuir un isolement international causé par la dictature. Pendant une longue période de ma vie, en tant que parlementaire espagnol, j’ai négocié l’entrée de l’Espagne dans l’UE. Ça a été logique de compléter cette action au sein du Parlement Européen. Le Parlement a été pendant 30 ans une chambre de consultation et de diplomatie mais sans grande compétence parlementaire. Aujourd’hui les compétences du parlement européen ont beaucoup augmentées. On en est à l’heure actuelle à un niveau quasi total de décisions. Il était donc souhaitable après 22 ans au Parlement espagnol d’aller au Parlement Européen pour changer d’air et pour conduire les opérations. Et une fois le traité de Lisbonne adopté, pour que les compétences deviennent une réalité flagrante. C’est une évolution logique et très satisfaisante.

Quelles évolutions avez-vous pu constater ici à Bruxelles, au sein des Institutions?

Il y a la question du multilinguisme. Il y a 24 langues représentées à l’heure actuelle. Avec l’entrée des nouveaux pays en 2004, ça a été un bouleversement de la communication et des mécanismes de l’UE. On ne peut communiquer avec les citoyens de ce processus européen que si tout ce qui se passe dans leur langue. La complication a donc cru de façon exponentielle. Il faut gérer la traduction et l’interprétation. C’est un changement sans précédent dans l’histoire. L’Union Européenne est la première instance politique en matière de langue dans le monde. Nous formons même les interprètes des Nations Unis.

Quelles sont les particularités de ce quartier européen dans Bruxelles?

Ça n’a rien à voir avec Bruxelles. Ici c’est une usine, c’est un quartier où on vient travailler. Il m’est arrivé de ne pas mettre physiquement les pieds dans Bruxelles pendant 6 mois. Il y a même un supermarché dans le Parlement pour faire les courses directement avant de rentrer chez soi. Il y a peut-être d’avantage de liens avec la ville pour les fonctionnaires qui vivent ici. Ce quartier est un quartier de bureau, qui se vide le week-end. C’est vide le samedi et le dimanche, le peu de magasins qui existent sont fermés, les restaurants aussi. Je refuse l’idée de quartier européen, ça n’existe pas.

Vous avez-vu ce quartier évoluer au fil du temps..

J’ai connu Bruxelles avant. Il y a avait tout un quartier ici qui était modeste. Toutes ces rues ont été rasées. Certains pensent que c’est dommage. Entre nous, c’était des quartiers peu intéressants si ce n’est d’un point de vue ethnographique.

Maintenant, il y a énormément de bâtiments. Il y a davantage de lobbyistes. Des représentations des grandes multinationales, des régions. Il y a énormément de stagiaires, de boursiers qui se préparent à mieux connaître les instances pour y travailler ou pour s’occuper de politiques européennes dans leurs pays respectifs. Il y a énormément de fonctionnaires aussi.

Quand toutes ces personnes sont-elles arrivées?

L’essentiel était déjà là quand je suis arrivé. Au fur et à mesure de l’arrivée des Etats, la dimension polyédrique est devenue plus compliquée. Au début, il n’y avait que 6 faces, aujourd’hui, c’est infiniment plus compliqué. Il y a toute une dimension nouvelle de langues slaves qui n’ont rien à voir avec les langues traditionnelles. Il y a donc une construction multiculturelle plus intéressante.

Ce sont 45 000 fonctionnaires qui sont installés à Bruxelles si on compte l’OTAN. Il y a un nombre très important de personnes avec un pouvoir d’achat élevé qui viennent vivre et consommer à Bruxelles. C’est un appât important pour Bruxelles. On a qu’à voir l’angoisse de Strasbourg à la pensée que le Parlement Européen puisse quitter Strasbourg.

Par exemple, le Parlement Européen représente 15000 personnes. C’est une petite ville qui vit dans une plus grande ville et c’est une énorme richesse pour la ville en question. Je pense que les Belges en sont conscients même si certains se plaignent. Bruxelles n’aurait pas pu pousser sans les instances communautaires.

Les affinités se font plus par nationalités ou par bord politique?

Au Parlement, il y a peu d’activités au niveau national. Je peux faire 5 ans de législature en ayant rencontré seulement 10 fois des représentants de mon pays. Il y a des parlementaires de mon pays mais d’autres bords politiques avec qui je n’ai jamais pris un café. On travaille surtout par regroupements politiques. Au Parlement, les sièges, se distribuent en fonction des partis. Quant aux fonctionnaires, le contact se joue fondamentalement avec ceux des commissions sur lesquelles on travaille. Je n’ai jamais connu de façon poussée que les fonctionnaires des commissions dont je faisais partie. Soit du bureau du parlement soit des portefeuilles dont j’étais responsable.

Interview par Eléonore Sens

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Eléonore Sens

Journalist

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