Florian Noack n’a que 24 ans, et pourtant sa carrière de pianiste est déjà internationale. Tout en poursuivant ses études entre Cologne et Bâle, il donne déjà des concerts de Beijing à Washington. Il déborde d’énergie, ses mains s’agitent pour souligner ses propos, qui se gorgent d’enthousiasme lorsque l’on aborde son compositeur favori du moment. Florian nourrit une passion pour Robert Schumann, qu’il affectionne particulièrement. Pour sa musique bien sûr, mais aussi pour l’histoire fascinante de son compositeur. Amoureux fou de son amie d’enfance, la pianiste virtuose Clara Wieck, il se heurte au refus obstiné du père de la belle de les laisser convoler.
Schumann glisse alors dans sa musique d’innombrables références à Clara, la seule dame de son cœur et de son esprit. Leur dialogue amoureux se poursuit ainsi sur les partitions, à l’abri du père obtus. Et le pianiste qui les joue se retrouve un témoin privilégié de cette romance. Cette histoire a une fin heureuse, l’amour triomphera et les deux amants pourront enfin se marier. Bien après leur mort, les partitions font toujours les délices des mélomanes et des interprètes du monde entier, comme Florian. Mais s’il est ainsi réclamé à travers le monde, ce n’est pas seulement pour sa passion et son talent… Le jeune pianiste a quelques surprises sous son couvercle.
La transcription, c’est en musique l’acte de traduire un morceau pour des instruments différents de ceux prévus initialement. C’est une vieille habitude pour les œuvres symphoniques qui nécessitent un grand orchestre. Pour pouvoir les montrer plus facilement, les compositeurs en faisaient une transcription pour piano, pour en donner un avant-goût à un public restreint.
Mais la transcription acquit ses lettres de noblesse en devenant peu à peu une œuvre à part entière, donnée en spectacle à une large audience. C’est le compositeur Franz Liszt qui initia ce mouvement, en transcrivant pour le faire connaître les œuvres d’un jeune compositeur de l’époque, nommé Richard Wagner.
Florian poursuit donc ce mouvement en construisant un répertoire unique de transcriptions. Pour lui, tout repose sur son envie de pouvoir jouer une œuvre sur son piano et de la faire partager à son public. Il a ainsi transcrit le poème symphonique Schéhérazade de Rimski-Korsakov et la musique du ballet Le Lac des Cygnes de Tchaïkovski, qu’il joue de façon virtuose jusqu’en Chine.
Mais lorsqu’il revient jouer à Bruxelles, c’est un peu un retour au pays. En effet, ses parents habitent la commune de Braine-l’Alleud, tout près de la morne plaine de Waterloo. Son père, flûtiste professionnel, et sa mère, professeure de latin, le mettent tout jeune à la musique pour compléter son éducation. Ils ne se doutaient pas qu’il en ferait sa voie.
À onze ans, il participe par curiosité à un concours. Là, les autres candidats plus âgés, les œuvres qu’ils exécutent, l’atmosphère d’émulation qui règne composent un cocktail qui met en marche son destin. Les défis que représentent les morceaux qu’il découvre appellent sa volonté à les relever.
Son premier maître est Yuka Izutsu, et sous sa férule, il progresse sans cesse sur le chemin ardu de la maîtrise de son instrument. Il remporte des concours en Belgique et commence à s’y bâtir une réputation. Pourtant, il décide de sortir de sa zone de confort et de partir à 16 ans pour le conservatoire de Cologne en Allemagne.
Là, il a un nouveau maître auprès duquel il apprend, se perfectionne, se révèle : Vassily Lobanov. Celui-ci fonctionne à l’intuition. C’est par l’intermédiaire d’une pièce de théâtre, d’un livre, ou d’une réflexion philosophique qu’il le guide sur le chemin sinueux d’une meilleure interprétation des œuvres. Parfois même, les mots ne sont plus nécessaires, ils se comprennent sans.
Pour Florian, «Ce qu’on joue n’est que l’accompagnement d’une voix intérieure». La musique écoutée par le public est le produit de ce qui se passe dans l’esprit et le corps du pianiste, alchimie délicate qu’une seule indication peut faire évoluer. Car jouer d’instrument est autant une affaire de dispostion de l’âme, que celle d’un corps-à-corps physique avec l’instrument.
Puis, c’est auprès de Claudio Martínez-Mehner, au conservatoire de Bâle, qu’il continue sa formation. Autre professeur, autre enseignement : celui-ci est beaucoup plus fondé sur l’analyse rigoureuse. Deux visions pour le même art, et Florian bénéficie des deux. Sa carrière internationale s’envole, aidé par un talent supplémentaire.
Outre la création de transcriptions, il milite également pour faire redécouvrir des compositeurs que l’on ne joue que trop rarement. Ainsi en est-il du russe Sergueï Liapounov. Il parcourt le monde et les salles de concert pour refaire revivre sa musique, par la force vive de son art.
Sillonnant le monde, il peut commenter sur la réception de la musique classique ici et ailleurs. En Chine, il joue dans de vastes salles, devant un public jeune débordant d’enthousiasme. À la manière d’une pop-star, on l’acclame dès son entrée en scène, sensation grisante. Mais Florian aime aussi donner un récital dans un cadre plus intime, car chaque œuvre appelle une atmosphère particulière pour être jouée.
Certains y verront le rire du destin, mais c’est au festival Schumann de Zwickau, la ville natale du compositeur, que Florian Noack rencontra celle qui partage à présent sa vie, en musique bien sûr.
Damien Gouteux
Florian Noack sera le 1er juin à Collioure, à la Rochelle le 30 juillet, le 17 août à Uchaux dans le cadre du Festival Liszt en Provence, et le 31 août à Paris.
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